Excès de médicaments aphrodisiaques : attention aux dangers
- Posted on 08/05/2024 19:29
- Film
- By abelozih@sante-education.tg
Extrait de l'article: Préoccupés par leurs performances libidineuses, de nombreux usagers ont régulièrement recours aux comprimés, décoctions, poudres et écorces. Des produits qui décuplent l’endurance et l’appétit sexuels. Hommes et femmes en usent et abusent de ces dif
Préoccupés par
leurs performances libidineuses, de nombreux usagers ont régulièrement recours
aux comprimés, décoctions, poudres et écorces. Des produits qui décuplent
l’endurance et l’appétit sexuels. Hommes et femmes en usent et abusent de
ces différents aphrodisiaques en vente libre sur le marché, faisant fi des
dangers énormes pour la santé.
Pommade,
écorce, racines, bande, liquide, sirop et comprimé, aphrodisiaques traditionnels ou médicalisés
sont vendus avec des promesses quasi magique : une érection facilitée ou
décuplée, une sensation de légèreté, une libido ou un orgasme plus intense, un
désir stimulé et performance au top. « J’ai besoin des racines pour booster ma performance au lit. J’ai
un sérieux problème avec mon pénis. Je prends du temps pour être en érection et
lorsque j’y parviens, cela ne dure pas. J’ai peur que ma femme aille voir
dehors. J’ai acheté des racines au marché, j’accompagne cela avec un verre d’alcool.
Le résultat est juste là », confie Patrick, 41 ans, Maitre tailleur
résidant à Adidogomé Logoté. Il poursuit en disant : « Lorsque que je n’ai pas les racines, je prends une boisson
énergisante que je mélange avec un Nescafé, du whisky et une poudre faite à
base d’écorces. Le résultat est pareil. Lorsque je n’ai pas les écorces, je fais recours à la médecine
moderne. Je prends en général, des comprimés en vente dans les coins de rue ou
souvent en pharmacie ; ils sont plus rapides. Ce sont des bons
démarreurs sexuels ».
La prolifération de ces produits aphrodisiaques sur les réseaux sociaux attire l’attention sur une pratique risquée. Vendus comme des remèdes miracles, ces produits suscitent des inquiétudes parmi les experts de la santé.
Des
facteurs favorisants
Les personnes souffrant de dysfonctionnement sexuel sont généralement dominées par des perceptions socio-culturelles. Elles considèrent comme « honteux » ou hautement « confidentiel » tous les problèmes touchant les organes génitaux. Cette tendance à se cacher des autres favorise le recours à des tradipraticiens ou tout simplement un vendeur des aphrodisiaques dans l’espoir de résoudre définitivement le mal sans l’exposer même à un médecin, dans la plus grande discrétion.
« La prédisposition
des populations à recourir à une automédication ouvre la voie aux entrepreneurs
voulant gagner facilement et même illicitement leurs survies, en
distribuant des produits pouvant être dangereux pour la santé. L’abondance
de l’offre de toutes les variétés des aphrodisiaques sur
nos marchés indique suffisamment l’expression de la
demande ou du moins le besoin, voire la consommation de ces produits par
une proportion importante de la population. Vraisemblablement, le business des
aphrodisiaques et autres produits de sexualité prospère bien. A tout ceci,
vient s’ajouter le faible accès aux services de
santé, notamment ceux de la santé sexuelle masculine avec
une forte concentration des médecins spécialistes en urologie à la capitale», estime
Mamadou Oury Sidibé,
Assistant social, Gestionnaire des Services de Santé au Centre Africain
d'Etudes Supérieures en Gestion (CESAG-Dakar)
La
quasi-absence de l’Etat dans le contrôle du marché de fabrication, d’importation
et de commercialisation des gammes de produits aphrodisiaques et de
sexualité (scientifiquement approuvés) constitue un facteur
essentiel. Il suffit de de se rendre dans nos différents marchés pour
constater l’exposition flagrantes et agressives des
produits aphrodisiaques aux emballages portant les images de
l’organe externe masculin, des grosses fesses et des gros seins de la
femme ; une fois encore, en violation de la pudeur et de nos normes
socio-culturelles et religieuses.
Enfin,
« certains hommes sont à la quête
permanente de la performance sexuelle ou de l’asur–performance même,
avec leurs partenaires sexuels. Le complexe de certains
hommes d’être inférieurs à la femme et le manque de communication
entre les couples dans un environnement ou le recours à un sexologue
ou un psychologue sont également non négligeables. Cependant, la
prise de traitement médicamenteux portant sur des organes aussi précieux comme
l’appareil génital masculin sans aucune prescription établie par un
professionnel de santé pourrait avoir des risques et conséquences
graves sur la santé publique », explique Mamadou Oury Sidibé,
Assistant social.
Risques
et dangers
« J’ai une expérience
des produits et comprimés aphrodisiaques en vente libre sur le marché. Après
avoir bu cela, tu auras une érection et tout va bien se passer. Mais, après
l’acte, tu ressens des maux de tête et des vertiges », confie Luc, Blanchisseur à Sagbado. Même si
leur efficacité est ressentie, les risques pour la santé, leurs effets
secondaires, sont bien bien réels.
La première
conséquence est celle psychologique. En effet, « les produits aphrodisiaques jouent sur le psychisme des
consommateurs. Ce sont plus les facteurs psychologiques que les principes
actifs qui fonctionnent. D’ailleurs, beaucoup
d’aphrodisiaques jouent sur l’analogie avec le pénis en érection ou le sexe féminin
», explique un sociologue.
Autre danger : « à force de prendre ça, on devient dépendant. Cette dépendance amène l’organisme à résister à ces produits pour en finir définitivement avec son érection. Le plus souvent, ça arrive très tôt », ajoute un médecin généraliste.
De plus, « l’utilisation
abusive de certains aphrodisiaques irrite les muqueuses urinaires. Ce qui
peut provoquer des urines sanglantes. Une surdose peut même être
mortelle. Malheureusement chez l’homme, ces orgasmes exagérés peuvent
conduire à des érections incontrôlées qui peuvent aboutir à ce qu’on appelle
priapisme, érection pathologique prolongée », affirme un
médecin urologue.
Dr Mosidi Fofana, gynecomed et sexologue (Guinée), a mis en garde contre les dangers potentiels de ces produits aphrodisiaques. « Bien que les vendeurs affirment qu’ils sont sans effets secondaires, la réalité est tout autre. En plus des risques liés à la contrefaçon et à l’ingestion de substances toxiques, l’automédication peut aggraver les problèmes de santé sexuelle et avoir un impact psychologique négatif sur les patients. », martèle-t-il.
« Attoté » devient dangereux
Dans un récent communiqué, l’Autorité
Ivoirienne de Régulation Pharmaceutique (AIRP) porte à la connaissance des populations que
des tests de contrôle qualité effectués par le Laboratoire National de Santé
Publique (LNSP) de Côte d’Ivoire, sur des échantillons des produits
aphrodisiaques dénommés «Attote original 100% naturel » et « la paix Congnons-Mousso-Yako
» ont révélé la présence d’importantes quantités de sildenafil dans ces
produits.
Le sildénafil, précise l’AIRP, est un produit
chimique médicamenteux indiqué dans la prise en charge du dysfonctionnement
érectile. L’introduction de cette substance dans ces produits dits naturels
constitue une adultération de ceux-ci. Il ne s’agit donc plus de produits
naturels fabriqués exclusivement à base de plantes. Selon l’AIRP, la
consommation de ces produits frelatés, surdosés au sildénafil entraîne des maux
de tête et des vertiges. Chez les patients hypertendus ou présentant des
risques cardiovasculaires, des Accidents Vasculaires Cérébraux (AVC), des
crises cardiaques, voire la mort subite, peuvent survenir.
La dysfonction érectile et
l’éjaculation précoce sont des troubles complexes qui nécessitent une
évaluation médicale approfondie, fait savoir Dr Mosidi Fofana, gynecomed et
sexologue. Il est crucial de comprendre que ces conditions peuvent être le
symptôme d’un problème. « Traiter uniquement les symptômes sans aborder
la cause profonde peut aggraver la situation à long terme », insiste-t-il.
Les inducteurs d’érection,
communément appelés aphrodisiaques, ne doivent en aucun cas être pris sans avis
médical. C’est pourquoi, Dr Mosidi Fofana affirme que les médicaments sont
soumis à des précautions d’emploi strictes et peuvent interagir avec d’autres
traitements. « Une consultation médicale est essentielle pour évaluer
les risques et bénéfices potentiels », recommande-t-il.
Bien lire les précautions d'emploi et se méfier
des produits vantant des effets « miracles » et « rapides ».
Le
premier geste fondamental pour retrouver de la libido est de prendre soin de
soi, et non de sa libido. Améliorer la
qualité du sommeil, manger sain et équilibré, pratiquer une activité sportive
régulière, se réserver quelques moments de détente.
Il
est temps d’agir
Des
axes d’intervention devront être suivis à plusieurs niveaux afin de
circonscrire la menace et limiter les conséquences de l’utilisation des
aphrodisiaques naturels scientifiquement non approuvés sur la santé des
populations. D’après Mamadou Oury Sidibé,
Gestionnaire des Services de Santé au Centre Africain d'Etudes
Supérieures en Gestion (CESAG-Dakar), il s’agira entre autres : la conduite d’études sur des
échantillons de produits aphrodisiaques et autres produits
de sexualité disponibles sur le marché parallèle, le renforcement de
la règlementation et le contrôle sur la fabrication, l’importation et la
commercialisation des aphrodisiaques et dérivés dits naturels, la collaboration
avec les praticiens de la médecine traditionnelle et
ceux de la médecine occidentale afin d’échanger sur le rôle et
la responsabilité de chacun dans la démarche de prise en charge des
patients, enfin la
sensibilisation des populations sur les risques et conséquences des
aphrodisiaques et dérivés dits naturels mais non approuvés
scientifiquement.
William
O.